∞ un amour dans la tempête.

《 Mon tendre amour;
Je suis persuadée que tu sauras me pardonner pour toutes les erreurs que j'ai commises dans le passé. Un jour, tu m'as dit que tu serais toujours là, qu'on marcherait ensemble vers l'avenir. Tu n'as pas tenu ta promesse. Ensemble, nous devions briser les barrières et faire de ton royaume, notre royaume. La princesse Sophia a beaucoup de chance d'avoir ton corps et ton âme, mais nous savons tous les deux où en est ton coeur. 》

En frottant son ventre rebondit, la jeune femme ne prit même pas la peine de signer la lettre. Ma mère savait bien qu'il comprendrait, qui saurait et peut-être qu'il regretterait un peu.


《 Je suis si désolée;
On entend la nouvelle du château jusqu'au bout du village, Sophia a mis au monde une troisième princesse héritière. Je vais mourir Ryan, mais avant cela, je dois te révéler mon secret, notre secret. Quand tu m'as abandonné lâchement, parce que c'était plus facile que d'affronter ton père, parce que c'était une décision politique, tu ne m'as dit qu'un au revoir rapide suivit d'un baiser sur le front. Moi, j'avais une grande nouvelle à t'annoncer, mais tu ne m'as pas écouté. Tu ne m'as pas laissé le temps de te dire que nous attendions un enfant. Ryan, je suis si désolée que tu aies fermé les yeux, parce que c'était plus simple ainsi. J'ai prénommé notre enfant Ryan, comme son père. Tu ne te doutais pas, il y a trois ans que tu avais déjà un héritier, un petit garçon qui attendait bien au chaud un peu d'amour de ta part. Je vais mourir Ryan, mais je voulais que tu saches combien ton choix facile était le mauvais. Adieu. 》

Il avait lu chacun des mots dans un silence brûlant, chaque syllabe se détachait du parchemin comme si l'encre noire aurait pu accentuer l'effet des mots. Mon père hurla son mécontentement, sa douleur et toute sa colère se déversèrent par vagues dans le château dont l'écho engloutissait chaque bruit. Il était seul, sur son trône et son seul héritier n'était pas à ses côtés.


《 À l'amour de ma vie;
Maman prend une route différente. Maman ne peut pas rester à tes côtés cette fois, mon ange. Je sais que tout ceci sera difficile à comprendre, mon petit, mais plus tard ce sera plus simple. Plus tard, tu affronteras cette vie merveilleuse et horrible qui s'offre désormais à toi. Joshua, mon amour, maman est si désolée de t'abandonner, mais mon amour pour toi est ce que j'ai de plus puissant à t'offrir. 》

Elle avait déposé sa plume, m'avait fait grimper sur ses genoux et m'avait embrassé le front durant de longues secondes. Si j'avais su pourquoi, je n'aurais sans doute pas quitté son étreinte, mais je voulais jouer et m'amuser, je n'avais que cinq ans quand maman est décédée et j'ai tellement pleuré qu'au bout d'un moment, plus aucune larme n'avait voulu couler.


JOSHUA RYAN GRIMES → L'enfant est constamment à la recherche de l'attention, il n'effectue pas les travaux demandés et Joshua est surexcité, il dérange en classe. Veuillez y remédier, s'il vous plaît.

Je suis là, plantée devant ma tante qui donne le mémo à son mari, puis elle croise les bras en m'observant très silencieusement. Tante Agathe n'est jamais silencieuse, je crois que j'ai vraiment fait quelque chose de mal, mais je n'arrive pas à savoir quoi. J'attends alors que mon oncle ait terminé de lire et il soupire, un long soupire très profond qui indique qu'il n'est pas content lui non plus.

▬ « Mais qu'est-ce qu'on va bien pouvoir faire de toi, Ryan ? »
▬ « Je n'en sais rien, tatie Agathe. »

Et c'est la vérité. Je n'ai que cinq ans, comment je pourrais savoir ce qu'un adulte doit faire de moi. Elle me fait signe de quitter la pièce d'un coup de main dans les airs, comme elle a l'habitude de le faire lorsqu'elle ne veut plus me voir. Je retourne à l'extérieur pour m'amuser avant que le soleil se couche, je ne suis qu'un enfant après tout.


Chers habitants,
Le monarque de notre village fera une apparition publique à la grande place. Il rencontrera ainsi toutes les familles qui auront des demandes à lui transmettre. Nous profiterons de cette occasion pour remettre à jour le recensement des enfants de sexe masculin qui auront six ans cette année.

▬ « Ce n'est pas très poli, jeune homme, de lire le courrier d'un autre. »

Je dépose rapidement le papier sur la table basse et je recule d'un ou deux pas. Je baisse bien la tête en signe de soumission, parce que je sais très bien qu'elle a raison et ce n'est pas la première fois qu'elle m'avertit.

▬ « J'aimerais beaucoup rencontrer le roi, il a le même prénom que moi et ... j'aurai six ans, cette année. »
▬ « Richard aura six ans, toi, ce ne sera pas avant l'an prochain. »
▬ « Mais ... »
▬ « Ne discute pas, Ryan. Sinon, ce sera privé de dîner pour toi. »

Je sais très bien quel âge j'ai et quel âge j'aurai cette année. Ils quittent tous la maison et je dois rester. Je sais que je vais entendre parler de cette journée durant des semaines, parce que mon cousin est un rabat-joie, qu'il aime bien me tourmenter. Je vais m'asseoir sur le bord de la fenêtre et j'observe ma famille quitter le domicile sans bouger, ni sans rien dire. Je dois être gentil, oncle Simon m'a déjà menacé de me laisser à la rue si je ne me tenais pas plus tranquille, je ne veux pas perdre ma famille à nouveau.


《 Mon amour;
Je veux que tu essaies d'être un gentil garçon. Je connais Agathe et elle sait être très patiente, mais je te connais, toi, encore mieux et je sais que tu es énergique. Ne perd pas cette belle joie de vivre, ce beau sourire, ce bonheur que tu dégages même sans t'en rendre compte. 》

▬ « Je le fais, mais seulement si tu le fais avant. »
▬ « Je ne peux pas faire ça, Malcolm. Mon oncle a dit " à ta prochaine bêtise, nous n'aurons pas le choix. " et je sais ce que cela veut dire. Je n'ai pas envie que ça arrive. »
▬ « Tu n'es qu'une poule mouillée et je ne suis pas copain avec les poules mouillées. »

Il commence à s'éloigner de moi et je grogne mon mécontentement avant de lui attraper le bras. Il se retourne et me regarde droit dans les yeux, le défi se lit sur ses lèvres.

▬ « D'accord. »

Je ne savais pas à ce moment qu'un simple mot pouvait à jamais changer ma vie, parce que je pensais vraiment que ma tante et mon oncle m'aimaient, qu'ils me disaient cela pour me faire peur. Et bien non, ils le pensaient.


10/02 : a volé un marchand de bijou rural.
06/04 : s'est battu avec un camarade de classe.
09/04 : s'est encore battu avec le même camarade, nous avons demandé qu'il change de groupe.
22/10 : refuse de manger ses repas, sans aucune raison.
16/11 : sera transféré à l'orphelinat Saint-Christophe le 17/11.

Dossier transféré à Saint-Christophe.


▬ « Est-ce que tu comprends ce que cela veut dire, Ryan ? »
▬ « Oui, cela veut dire qu'une famille se cherche un souffre-douleur pour mieux faire passer les accès de colère de papa en disant que ce n'est pas sa faute, que c'est à cause du vilain orphelin qui n'est pas capable de se tenir. »
▬ « Ryan ! »
▬ « Désolé, madame Scuyler. »

Je ne suis pas désolé du tout, je sais que ce que je vais vivre là-bas, aussi court mon séjour soit-il, ce ne sera pas une impression du paradis. J'ai huit ans et ce sera la cinquième famille qui me prend sous son aile en pensant me sauver, en pensant me contrôler. Je suis incontrôlable et je n'ai pas besoin d'être sauvé.


Claire Johnson lève les yeux de son roman et pose un regard sur moi. Ce n'est pas le regard auquel je m'attendais au début de notre aventure, je ne pensais pas qu'autant de tendresse pouvait se transmettre par la force des yeux.

▬ « Tu m'observes d'une bien drôle de manière, Joshua. »
▬ « C'est parce que vous êtes magnifique, mère. »

Elle me fait un sourire et je lui rends le même, un reflet de sa gentillesse et de sa bonté. J'ai passé 9 ans avec les Johnson, si bien que j'en ai oublié ma vie de grand torturé, son enfance horrible. J'ai pu aller dans les meilleures écoles et apprendre à bien me tenir, je suis devenu un parfait gentleman. Je n'ai que dix-sept ans, mais je sais que tout va bien aller tant que Claire et Patrick restent à mes côtés.


▬ « Monsieur Reynolds ? »
▬ « Oui ? »
▬ « Dans votre rapport, il nous manque un détail, quelle heure était-il lorsque vous faisiez le tour du quartier ? »
▬ « Pas plus de dix-neuf heures. »
▬ « Alors, vous avez entendu un cri de femme, c'est bien cela ? »
▬ « Non. Nous avons été alerté par les voisins qui nous ont informés avoir entendu des cris et une bagarre. Lorsque nous sommes entrés, le cadet de la famille tenait le corps de la mère dans ses mains, son regard était vide et son corps était couvert du sang de la victime. »
▬ « Refue-t-il toujours de parler ? »
▬ « Oui et Mr. Johnson refuse de le ramener chez lui, il est certain hors de tout doute que c'est la faute du petit. On a tout un dossier sur lui, des vols, des bagarres, il n'a jamais été bien gentil depuis sa naissance. »
▬ « Enfermez-le au cachot et nous verrons ce que l'on fera de lui, si on arrive à en tirer quelque chose. »


Dix-huit ans.
Mes yeux sont noyés de larmes contenues, parce que j'avais raison, parce que je savais qu'il était violent et que je n'ai jamais agi. Il était trop tard pour les regrets.

Dix-neuf ans.
Jade est venue me voir au cachot pour me faire dire la vérité, mais je me suis promis de ne pas lui dire, jamais. Ce serait trop dur pour elle, ma soeur, d'apprendre que c'est son père le coupable. J'ai appris qu'elle avait déménagé avec son fiancé et qu'elle m'attendait pour se marier, donc elle était convaincue que je n'avais pas fait ce pour quoi on m'enfermait ici.

Vingt ans.
Je me remémore encore la scène, comme si cela pouvait la rendre moins réaliste. Il lui a lacéré l'abdomen à plusieurs reprises avec le grand couteau de la cuisine. Attendez, et c'est moi qu'on traite de fou psychopathe . J'ai juré, il va payer.

Vingt et un ans.
Je suis prêt à sortir maintenant. J'ai repris le contrôle de moi - même, je suis gentil avec ceux qui m'emportent le peu de nourriture qu'ils me fournissent. Je parle même de temps en temps, j'essaie vraiment d'avoir l'air normal.

Vingt-deux ans.
Je sors. C'est la première fois depuis cinq ans que je vois le soleil se lever. Jade m'a donné l'adresse de sa maison, elle m'hébergera quelque temps. J'aime ma soeur et, elle me le rend bien.


Je ne sais toujours pas comment qualifier cette sensation, son sang se répand rapidement autour de son corps, ses yeux m'observent, mais ils ne me verront plus jamais. Je me suis rendu justice, j'en suis heureux et fier.

▬ « Je t'ai vengé, maman. »

Je me retourne et je sors de la maison par l'entrée arrière afin d'éviter de me faire voir. Je déteste cette partie de moi qui avait besoin de cet acte pour reprendre sa vie, il le fallait. Je serais devenu fou si je n'avais pas fait ce qu'il fallait faire, plus personne ne souffrirait à cause de Patrick Johnson.


▬ « Joshua, mon amour, est-ce que tu es prêt ? »
▬ « J'arrive, ma chérie. »

Je ne me fais plus appeler Ryan, Ryan est une mauvaise personne ; c'est une personne que je ne veux plus jamais être. Je m'approche de Rose, ma femme, avec un sourire sous-entendus. Nous allons prendre une marche aujourd'hui, parce que les docteurs nous ont ordonné de le faire. Mes yeux s'attardent longuement sur son ventre bien rond qui l'a empêché de bouger durant les derniers mois. Notre enfant ne lui a pas donné la vie facile, il a obligé sa mère à rester couchée durant les trois mois qui viennent de passer. Ce n'est pas grave, le grand jour est arrivé et la sage-femme a dit que si nous voulions le voir sortir, il fallait absolument que maman bouge un peu. Je me souviens du sourire de ma femme lorsque la sage-femme lui avait enfin donné la permission de se lever, ce type de sourire n'a pas de prix. Nous marchons ensemble plusieurs minutes, puis ses jambes refusent d'aller plus loin, je la prennent donc dans mes bras et nous retournons à la maison. Quelques heures plus tard, ce fût ce moment, le moment que nous attendions depuis des jours déjà.


Si on t'avait dit, il y a vingt-cinq ans, que tu serais un homme bien avec une famille, jamais tu n'y aurais cru, mais c'est exactement ce qui s'est passé. Tu es un homme vaillant, heureux, qui mérite de vivre sa vie à fond et de profiter de chaque instant de bonheur. Tu es né dans ce nouveau monde alors tout ce qui appartient à l'ancienne vie des combattants, tu n'y connais absolument rien, mais ce monde-ci te plaît énormément.